CHRONIQUE : LES PLAINTES NE RESOUDRONT PAS VOS PROBLEMES PERSONNELS. Partie2

 Nous étions en début d'octobre 2014, encore en ce temps, je ne me plaignais pas trop, sinon pas du tout. L’espoir était là. C’était une matinée joviale quand j’étais plongé dans une grande joie. J’imaginais déjà comment j’allais affronter ma deuxième année universitaire en socio-anthropologie toujours à l’université des lettres et des sciences humaines de Bamako, je voyais déjà comment cette année serait belle tout comme la première, j’étais admis sans dette. Tout à coup, je reçus un appel venant de ma mère et ma joie devint encore plus grande. Elle m’annonça la bonne nouvelle. 

Eh oui ! j’étais aussi admis au concours.

Ainsi, j’entrai à l’institut de formation de maîtres (IFM) de Tominian en 2014. C’était une bonne chose pour moi à l’époque. Je croyais trouver le chemin raccourci d’accéder à l’emploi car, cette formation durerait seulement deux années, comme mentionné précédemment. J’étais encore loin de toute plainte. J’ai commencé à planifier ma vie sur les années à venir. Je me voyais déjà en fonction dans trois années au plus tard du début de la formation.

Je me voyais déjà épouser une femme dans quatre ans. Je planifiais déjà la maison que j’aurais construite dans 10 ans, les voyages que j’allais effectuer hors du pays. Je voyais la belle voiture que je serais en train de rouler. Je me voyais mener une vie réussie où je ne manquerais de rien « côté financier ». Je me disais que j’allais pouvoir enfin réaliser tous mes projets et faire quelque chose pour mes parents, et mes frères et sœurs. Je me voyais échapper au chômage qu’ont connu mes grands frères.

Peu de temps plus tard, je commençai à réaliser  que mon rêve était beau pour ne pas se concrétiser. Je découvris que cette étape semblait à celle de la petite enfance et que la réalité lugubre était encore devant moi. Mes planifications ont cessé au bout de trois ans.

Nous étions maintenant en 2016 quand j’effectuais mon stage de fin de cycle dans un village à plus de 200 km de Bamako. Je connus une particularité lors mon stage, un redéploiement dans une autre école après avoir passé trois mois à la première. Je n’avais jamais imaginé me retrouver dans une telle localité un jour. Un lieu quasi-totalement déconnecté de la modernité, encore en 2016. J’effectuai un séjour indélébile dans cette zone. Instabilité de réseau téléphonique, très faible accès à Internet, absence quasi-totale de centre de santé, etc. Faut-il témoigner que les habitants étaient d’une hospitalité bienveillante. Le cousinage à plaisanterie qui existait entre presque tout le village et moi me rendit le séjour agréable. Je fis 5 mois avec les habitants de janvier en mai.

J’étais enfin enthousiasmé par le métier d’enseignant et me voyais intégrer la fonction publique des collectivités l’année suivante, bien que cela n’ait été qu’un moyen d’échappatoire au départ. Jusque-là tout était bon pour moi. J’avais l’esprit tranquille.

On était en juin 2016, nous effectuâmes les examens de sortie. Les résultats étaient bons et on obtint enfin les diplômes. Nous étions fins prêts pour le prochain concours de la fonction publique des collectivités. Nous dûmes attendre jusqu’en décembre pour le lancement du concours.

C’est là que j’ai personnellement commencé à perdre de l’espoir. Le quota demandé par section était insignifiant par rapport au nombre de candidats postulés pour le test.  Le concours se tint en janvier 2017. Mais il fallait attendre la sortie des résultats pour que je commence réellement à me plaindre.

  • -        C’est de la moquerie ce que font ces gens-là.
  • -        Un quota de 85 sur plus de 4000 candidats. Ne m’arrêtais-je pas de me plaindre avec d’autres camarades.

Comme vous pouvez deviner, je venais de taper poteau avec plusieurs autres milliers de candidats. La fonction publique des collectivités était restée pour nous un désir loin d’être satisfait, et l’ensemble de nos plans avait été affecté par ce résultat au cours de cette année-là. Depuis ce temps, mes plaintes n’avaient pas cessé.

Je me plaignais dorénavant à tous les niveaux, je me voyais maintenant comme une victime.

  • -        Nous avons un gouvernement incompétent.
  • -        Le président d’ailleurs n’est pas en train de tenir ses promesses préélectorales.
  • -        Ah ! les décideurs sont corrompus.
  • -        Ce pays fonctionne sur du tribalisme. Tant qu’on n’est pas du côté du pouvoir, on ne gagne rien.
  •         Il faut forcément un pot-de-vin pour trouver une place dans ce pays.
Tels étaient des propos qui occupaient constamment ma tête et qui sortaient dans les discussions auxquelles j’étais chaque fois impliqué. Mes amis et moi n’arrêtions pas de descendre le président, le gouvernement, l'assemblée nationale, bref, les hommes politiques étaient devenus le sujet principal de nos discussions. Personne parmi eux n'était appréciée dans notre cercle de regroupement. Ils étaient la cause de tout le malheur que vivent les gens dans le pays et particulièrement de notre insuccès au concours, c'était donc à cause d'eux que nous n'avions pas eu la fonction publique.... A BIENTÔT pour la Partie3

Commentaires

Unknown a dit…
C'est malheureusement notre triste réalité à tous.
Unknown a dit…
Je l'ai lu avec beaucoup d'attention, vivement la partie 3.
Unknown a dit…
Une triste réalité mon frère que nous avons tous vécu
Unknown a dit…
Beaucoup de courage Ben, on est tous victime du système
El Flaco a dit…
Je me retrouve pleinement dans ce récit. Vivement la partie 3.
Unknown a dit…
Ce récit de vie m'a tellement touché on dirait que c'est moi même qui exprime mes vécus. On attend impatiemment la suite.
Unknown a dit…
Je suis vraiment ému par ta plume mon frère. si je dois contribuer à ta rédaction, ce serait de signaler deux erreurs de frappe à savoir : la date au début de la page et 'ce pays fonction' au lieu de fonctionne vers la fin de l'article.
Tu as fait un superbe job!!!